Clara Watt
Vit et travaille en France
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The Promotion of Proper Human Sexual Rights and Family Values
« Enfant, j’étais fier de mon pays, d’être ghanéen. Ce sentiment changea lorsque je devins qui j’étais – vous ne pouvez pas être homosexuel au Ghana sans regarder tous les jours derrière vous. » Un homosexuel ghanéen, interviewé en avril 2022.
Ce projet documente le vote d’une loi anti-LGBTQ+ au Ghana en utilisant des portraits et des collages pour montrer le contraste entre l’expression et la répression. L’objectif est d’attirer l’attention collective sur ces violations de droits humains, de défendre le progrès social et la protection des communautés LGBTQ+ au Ghana, dans le continent africain et au-delà. Avec l’aide du Prix Virginia, j’espère donner plus d’écho à ces voix et ces expressions réduites au silence, et nourrir une large compréhension et un soutien pour les droits des LGBTQ+ au Ghana à cette époque si urgente.
Février 2021 : le premier lieu dédié à la communauté LGBTQ+ ouvre. Deux semaines plus tard, il est assiégé et obligé de fermer par les forces de l’ordre locales. Ces événements sont symptomatiques d’une homophobie institutionnalisée et d’une rhétorique basée sur la religion et contre les LGBTQ+. Qui culmine avec « La Promotion des Véritables Droits Sexuels Humains et des Valeurs Familiales », une loi établie par des membres privés pour mettre en place avec la complicité de l’état un système de discrimination et de violence à l’encontre des personnes LGBTQ+ et de leurs soutiens. En 2024, le Ghana vota en faveur de cette loi. Une fois qu’elle sera passée, les activités LGBTQ+ et de leurs alliés seront considérées comme criminelles, passibles de 3 à 5 ans de prison. Être simplement identifié comme LGBTQ deviendra un crime. Depuis la première introduction de la loi au Parlement en août 2021, les communautés LGBTQ+ ont déjà subi une augmentation des attaques violentes, des chantages et des enlèvements.
A l’origine, mon projet, débuté en 2022, voulait montrer de fiers portraits de la communauté LGBTQ+ du Ghana. Malgré la menace d’une loi qui leur retirerait tous droits humains, tous mes modèles ont courageusement fait le choix d’afficher leur visage et de partager leurs noms (qui constituaient à l’origine les titres des photos). Ce chapitre fut exposé en Allemagne, à Paris et à travers les Pays-Bas. Une fois la loi votée en début d’année, je compris que cette exposition était dangereuse. Tous mes modèles demandèrent à ce que leur photo soit retirée de peur d’être persécutés et poursuivis en justice.
Si les thèmes sous-jacents restent inchangés, l’exploration de l’identité, la survie et l’amour, ce projet a désormais pris une nouvelle forme. Un second chapitre dans cette histoire en mutation. Des portraits qui devaient à l’origine donner à voir le courage et la force de la communité, ces visages et les personnes derrière eux sont désormais devenus des sortes de figures fantomatiques, cachées derrière une loi qui nie et criminalise leur existence de Ghanéens, d’Africains et d’êtres humains (les titres des photos ont également été modifiés, passant du nom du modèle à un « numéro de clause » contenu dans la loi pour cacher leur identité). Il en va de ma responsabilité de respecter leur souhait d’anonymat tout en conservant leur présence et leur impact aussi vibrantes que possible. Le développement de cette série au fil du temps révèle la réalité vécue de la communauté LGBTQ+ ; la répression de leurs rêves, leurs désirs et de leurs futurs.
Ils sont peut-être cachés, pour l’instant. Mais la communauté LGBTQ+ au Ghana et au-delà reste puissante, unie, créative et pleine d’espoir pour un futur où ils pourront vivre une vie sans peur, et un jour renaître des ombres qu’une loi discriminatoire et draconienne a jetés sur eux.