Celine Marchbank

Vit et travaille à Londres
www.celinemarchbank.com

Tulip. My mother’s favourite flower

Cette histoire a débuté le 30 septembre 2009, le jour où l’on a diagnostiqué un cancer à ma mère. Elle était au stade 4 d’un cancer du poumon, doublé d’une tumeur au cerveau, le pire scénario qui soit. S’ensuivit sur un an une succession de traitements émotionnellement et physiquement invalidants, période à l’issue de laquelle il semblait clair qu’aucun n’avait marché. C’était trop tard. En avril 2010, le diagnostic fut confirmé : ma mère était en phase terminale.

Depuis le moment où l’on diagnostiqua son cancer à ma mère, j’ai essayé de prendre des photos, non seulement d’elle, mais aussi des choses qui me faisaient penser à elle, toutes ces choses qui allaient partir en même temps qu’elle. La décision d’en concevoir un projet photographique a été dure à prendre. Je me souviens m’être dit que ce n’était pas la bonne chose à faire, que je m’apprêtais à instrumentaliser sa douleur. Je trouvais déjà difficile pour moi d’accepter les conclusions du diagnostic, alors coller mon objectif dessus ne rendrait-il pas la situation encore plus pénible ? J’ai commencé par évoquer en photos son traitement médical, et je pense aujourd’hui que c’était là la partie la plus facile. Quand on apprit que ma mère était en phase terminale, et que mes photos se concentrèrent uniquement sur ma mère, au lit, à la maison, la situation s’avéra beaucoup plus difficile. Après tout, j’étais sa fille et non sa photographe.

Bien sûr, ce fut une période excessivement douloureuse pour moi, mais je sentais qu’il était important de la relater ; après tout, j’étais photographe documentariste, et, plus que jamais, je ressentis la nécessité de tout consigner, telle une sorte de pie collectant les pensées et les moments plutôt que les objets brillants.

Je ne souhaitais pas que ce projet devienne un portrait graphique de sa mort. Ma mère était une femme formidable, et me concentrer uniquement sur cet aspect-là relevait pour moi de l’impossibilité et de l’erreur. Je voulais regarder les éléments qui la définissaient de façon unique. L’amour qu’elle portait aux fleurs représentait une part merveilleuse de sa personnalité. Elle en remplissait constamment sa maison. C’est en observant les fleurs à travers mon objectif que j’ai compris qu’elles symbolisaient ce qui était en train de se passer : elles représentaient le bonheur, l’amour, la gentillesse et la générosité, mais également la solitude, la décrépitude, et enfin, la mort. Son intérieur était particulier, à son image.